Pour comprendre immédiatement avec quel soin, avec quelle attention les pasteurs devront travailler à bien expliquer aux fidèles ce neuvième article du Symbole, deux considérations sont nécessaires et suffisantes. La première, c’est que, suivant la remarque de Saint Augustin, les prophètes ont parlé plus clairement et plus longuement de l’Eglise que de Jésus Christ, car ils prévoyaient qu’il y aurait beaucoup plus d’erreurs volontaires et involontaires, sur ce point que sur le mystère de l’Incarnation. En effet, il ne devait point manquer d’impies pour prétendre, à l’imitation du singe qui veut faire croire qu’il est homme, pour prétendre avec autant d’orgueil que de méchanceté qu’eux seuls sont catholiques, que l’Eglise Catholique est parmi eux, et seulement parmi eux. -- La seconde considération, c’est que celui qui aura gravé profondément dans son cœur la foi à la vérité de l’Eglise, n’aura pas de peine à éviter le terrible danger de l’hérésie. On n’est pas hérétique par le fait seul qu’on pèche contre la Foi, mais parce qu’on méprise l’autorité de l’Eglise, et qu’on s’attache avec opiniâtreté à des opinions mauvaises. Si donc il est impossible qu’un Chrétien soit atteint de cette horrible peste de l’hérésie, tant qu’il continue à croire ce que cet article propose à sa Foi, les Pasteurs doivent redoubler d’efforts pour instruire les Fidèles de ce mystère, les prémunir par là même contre les artifices de l’ennemi, et les aider à persévérer dans la Foi. Au reste cet article dépend du précédent. Après avoir montré que toute sainteté vient de l’Esprit Saint comme de sa source et de son Auteur, nous reconnaissons maintenant, par voie de conclusion, que la sainteté qui est dans l’Eglise ne peut sortir que de Lui.
Le mot Eglise vient du grec. les Latins l’ont emprunté à cette langue, et après la publication de l’Evangile, ils l’ont consacré exclusivement aux choses saintes. Voyons quel en est le sens. Il signifie proprement convocation. Mais avec le temps les auteurs l’ont emprunté souvent pour désigner une assemblée, une réunion d’hommes, sans examiner si ces hommes admiraient le vrai Dieu, ou les fausses divinités. nous lisons au livre des actes que le greffier de la ville d’Ephèse, après avoir apaisé le peuple, lui dit: (Act., 19, 39.) Si vous avez quelque autre affaire à proposer, nous pourrons la traiter dans une assemblée légitime. Ainsi l’assemblée du peuple d’Ephèse est appelée légitime, bien que ce peuple fût adonné au culte de Diane. Et non seulement ce nom d’Eglise est donné aux nations qui ne connaissent pas Dieu, mais quelquefois même il est appliqué aux assemblées des méchants et des impies. Je hais l’Eglise des méchants, dit le prophète, (Ps., 25, 5.) et je ne m’assiérai point avec les impies. Mais dans la suite, l’usage ordinaire de la Sainte Ecriture fut de consacrer ce mot à désigner uniquement la société chrétienne et les assemblées des fidèles, c’est à dire de ceux qui ont été appelés par la foi, à la lumière de la vérité et à la connaissance de Dieu, qui ont dissipé les ténèbres de l’ignorance et de l’erreur, qui adorent avec piété et sainteté, le Dieu Vivant et Véritable, et qui le servent de tout leur cœur. Enfin, pour tout dire en un mot, l’Eglise, selon S Augustin (S. Aug. in Psal. 149.), c’est le peuple fidèle répandu dans tout l’univers. Mais ce mot de l’Eglise renferme de véritables mystères, et des mystères très importants. En effet, si nous l’entendons dans le sens de convocation, nous voyons aussitôt briller à nos yeux la douceur et la lumière de la Grâce divine, et nous sentons combien l’Eglise diffère de toutes les autres sociétés. Celles-ci ne se soutiennent que par la raison et la prudence humaines ; celle là repose sur la Sagesse et le Conseil de Dieu même. Car Dieu nous a appelés intérieurement par l’inspiration de son Saint Esprit, qui ouvre les cœurs, et extérieurement par les soins et le ministère des Pasteurs et des prédicateurs. Et nous voyons bientôt que la fin de cette vocation, c’est la connaissance et la possession des choses éternelles, si seulement nous remarquons qu’autrefois le peuple fidèle, sous la loi de Moïse, se nommait synagogue, c’est-à-dire troupeau. Car, dit Saint Augustin, (Saint Aug. in Psal., 77 et 81.) ce nom lui avait été donné parce que, comme les animaux qui cherchent à se grouper pour vivre, il n’avait en vue que des biens terrestres et périssables. Au contraire, le peuple chrétien s’appelle non pas synagogue, mais assemblée, ou convocation, parce qu’il méprise les choses terrestres et périssables, pour ne s’attacher qu’aux biens célestes, et qui ne passent pas.
Il est encore d’autres noms mystérieux qui servent à désigner la Société des Chrétiens. Ainsi l’Apôtre Saint Paul l’appelle la Maison et l’Edifice de Dieu. Je vous écris, dit-il à Timothée, (I Tim., 3, 15.) afin que, si je viens à tarder trop longtemps, vous sachiez comment vous devez vous conduire dans la maison du Dieu Vivant, la colonne et le fondement de la Vérité. L’Eglise est appelée ici maison parce qu’elle est comme une famille, qui n’est gouvernée que par un seul, le Père de famille, et dans laquelle tous les biens spirituels sont communs. On lui donne encore le nom de troupeau des brebis de Jésus-Christ (Éz., 34, 3. ; Jean, 29, 7.) qui en est le Pasteur et en même temps la porte de la bergerie ; celui d’épouse de Jésus-Christ: (II Cor., 11, 2) Je vous ai fiancés, dit l’Apôtre aux Corinthiens, à un Epoux unique, Jésus-Christ, pour vous présenter à Lui comme une vierge pure. Ecoutons-le dire aux Ephésiens: (Éph., 5, 25.) Maris, aimez vos épouses, comme Jésus-Christ aime l’Eglise. Puis, en parlant du Mariage: Ce Sacrement est grand, je dis en Jésus-Christ et dans l’Eglise. Et enfin celui de Corps de Jésus-Christ, comme on peut le voir dans les Epîtres aux Ephésiens (Éph., 1, 23.) et aux Colossiens (Col., 1, 24.). Ces différents noms sont très propres à exciter les Fidèles à se rendre dignes de la Clémence et de la Bonté infinie de Dieu, qui les a choisis pour en faire son peuple.
Après ces explications, il sera nécessaire d’énumérer les diverses parties qui composent l’Eglise, et de marquer les différences qui existent entre chacune d’elles. Ainsi les Fidèles connaîtront mieux la nature, les propriétés, les dons et les grâces de cette Eglise, si chère à Dieu, et ils ne cesseront de louer son nom trois fois Saint.
Il y a dans l’Eglise deux parties principales: l’une que l’on appelle triomphante, et l’autre militante.
L’Eglise triomphante est cette Société si brillante et si heureuse des esprits célestes, et de tous ceux qui ont remporté la victoire sur le monde, la chair, et le démon notre ennemi acharné, et qui maintenant délivrés sans retour des misères de la vie, jouissent de la Béatitude éternelle.
L’Eglise militante est la Société de tous les Fidèles qui vivent encore sur la terre. On l’appelle militante parce qu’elle est obligée de soutenir une guerre incessante contre les ennemis les plus cruels, le inonde, la chair et Satan.
Toutefois, il ne faut pas pour cela croire qu’il y a deux Eglises. non, l’Eglise est une, mais elle est composée de deux parties. De ces deux parties, l’une a précédé l’autre, et elle est déjà en possession de la céleste Patrie. La deuxième marche chaque jour à la suite de la première, jusqu’à ce que, enfin, elle se réunisse à notre Sauveur, et se repose au sein de l’Eternelle Félicité.
L’Eglise militante renferme deux sortes de personnes, les bons et les méchants. Les méchants participent aux mêmes Sacrements et professent la même Foi que les bons ; mais ils diffèrent d’eux par la conduite et les mœurs. Les bons ne sont pas ceux qui sont unis seulement par la profession de la même Foi et la participation aux mêmes Sacrements, mais ceux qui sont attachés les uns aux autres par l’esprit de Grâce et le lien de Charité. C’est d’eux qu’il est dit: (II Tim., 2, 19.) Le Seigneur connaît ceux qui sont à Lui. Les hommes peuvent bien aussi, d’après certaines conjectures, présumer qui sont ceux qui doivent être rangés parmi les bons, mais ils ne peuvent jamais l’affirmer avec certitude. Aussi faut-il se garder de penser que Notre-Seigneur Jésus Christ a voulu parler de cette portion de l’Eglise, lorsqu’il nous renvoie à l’Eglise et nous ordonne de lui obéir. Puis qu’elle est inconnue, comment savoir, sans crainte de se tromper, à quel tribunal il faudra recourir, et à quelle autorité on devra se soumettre ? L’Eglise comprend donc indistinctement les bons et les méchants, comme la sainte Ecriture et les Pères nous l’enseignent, et comme l’Apôtre le marquait en disant: (Éph., 4, 4.) Il n’y a qu’un corps et qu’un esprit. Ainsi entendue, l’Eglise est connue de tout le mon de. C’est (Matth., 5, 14.) la ville située sur la montagne, et que l’on aperçoit de toutes parts. Elle ne doit être ignorée de personne, puisque tous doivent lui obéir. Et ce qui prouve encore qu’elle comprend non seulement les bons, mais même les méchants, c’est ce que l’Evangile nous apprend par plusieurs paraboles, par exemple quand il nous dit que le Royaume des cieux, c’est-à-dire l’Eglise militante, (Matth., 13, 47.) est semblable à un filet jeté dans la mer, (Matth., 13, 24.) à un champ dans lequel on a semé l’ivraie sur le bon grain, (Luc, 3, 17.) à une aire où l’on garde la paille avec le froment, (Matth., 25, 1, 2.) à dix vierges dont les unes sont folles, et les autres prudentes. Et, longtemps auparavant, l’Arche de Noé (Gn., 7, 2. ; I Pierre, 3, 20.) où étaient renfermées toutes les espèces d’animaux, purs ou impurs, était déjà la figure et l’image de l’Eglise. Cependant quoique la Foi catholique enseigne comme une vérité constante et hors de doute, que les méchants aussi bien que les bons font partie de l’Eglise, elle veut aussi que l’on montre aux Fidèles combien leur condition est différente. Les méchants en effet ne sont dans l’Eglise que comme la paille confondue dans l’aire avec le bon grain, ou comme des membres morts sur un corps vivant.
De ce que nous venons de dire il résulte que trois sortes de personnes seulement sont exclues de l’Eglise: premièrement les infidèles, ensuite les hérétiques et les schismatiques, et enfin les excommuniés. — Les infidèles, parce que jamais ils n’ont été dans son sein, qu’ils ne l’ont point connue, et qu’ils n’ont participé à aucun Sacrement dans la société des Chrétiens. — Les hérétiques et les schismatiques, parce qu’ils l’ont abandonnée, et que dès lors ils ne peuvent pas plus lui appartenir qu’un déserteur n’appartient à l’armée qu’il a quittée. Cependant, on ne saurait nier qu’ils ne restent sous sa puissance. Elle a le droit de les juger, de les punir, de les frapper d’anathème. — enfin les excommuniés, parce qu’elle les a chassés de son sein par sa Communion, tant qu’ils ne se convertissent pas. Pour tous les autres, quelque méchants et quelque criminels qu’ils soient, il n’est pas douteux qu’ils font encore partie de l’Eglise. Et c’est une vérité qu’on ne saurait trop redire aux Fidèles, afin que si par malheur la vie de leurs Chefs spirituels devenait scandaleuse, ils sachent bien que même de tels Pasteurs appartiendraient toujours à l’Eglise, et ne perdraient rien de leur autorité.
Il est assez ordinaire de donner le nom d’Eglise à de simples parties de l’Eglise universelle. Ainsi l’Apôtre parle de l’Eglise de Corinthe, de la Galatie, de Laodicée, de Thessalonique. Il appelle même Eglise des familles particulières de Chrétiens. Ainsi il ordonne (Rm., 16, 4, 5.) de saluer l’Eglise domestique de Prisca et d’Aquila, et dans un autre endroit, (I Cor., 16, 19.) Aquila et Priscilla, dit-il, avec l’Eglise qui est dans leur maison, vous saluent très affectueusement dans le Seigneur. II s’exprime de la même manière en écrivant à Philémon. (Philipp., 1, 2.)
Quelquefois le mot d’Eglise ne désigne que les Prélats et les Pasteurs. (Matth., 18, 17.) S’il ne vous écoute pas, dit Jésus Christ, dites-le à l’Eglise, c’est-à-dire à ses Pasteurs. Enfin, le lieu où s’assemble le peuple pour entendre la Parole de Dieu, ou pour accomplir quelque devoir religieux, ce lieu même est appelé l’église: Mais dans cet article, l’ensemble de tous les chrétiens bons et méchants, ceux qui doivent obéir aussi bien que ceux qui commandent, tous sont également compris sous le nom d’Eglise.
Le moment est venu de faire connaître aux Fidèles les propriétés et les caractères de l’Eglise. Rien n’est plus propre à leur faire sentir quel immense bienfait Dieu leur a accordé en les faisant naître et grandir dans son sein.
Le premier caractère que lui donne le Symbole, de Nicée, c’est l’Unité. (Cant., 6, 8.) Ma colombe est unique, dit l’Epoux des Cantiques, elle seule est belle. Or, lorsque nous disons qu’une si grande multitude d’hommes, répandue en tant de lieux divers, est une, c’est parce que, comme le dit l’Apôtre écrivant aux Ephésiens, (Éph., 4, 4.) Il n’y a qu’un Seigneur, une Foi, un Baptême. En effet, l’Eglise n’a qu’un seul Chef, un seul conducteur invisible, Notre-Seigneur Jésus-Christ, établi par le Père Eternel, (Éph., 1, 22.) Chef (ou tête) de toute l’Eglise qui est son corps ; et un seul Chef visible qui est le successeur légitime de Saint Pierre sur le siège de Rome.
Tous les Pères sont unanimes sur ce point que ce Chef (cette tête) visible de l’Eglise était nécessaire pour établir et conserver son unité. Saint Jérôme l’avait admirablement compris, et il le dit très bien contre Jovinien, (S. Hier. Lib. 1. Conf. Jov.) un seul est choisi, afin que le Chef une fois constitué, il n’y ait plus de prétexte au schisme. Et dans sa lettre au Pape Saint Damase: que l’envie, que l’ambition et la grandeur romaine disparaissent I je parle au successeur d’un pécheur et au disciple de la Croix. ne suivant d’autre premier Chef que Jésus-Christ, je suis uni de communion à votre Sainteté, c’est-à-dire à la Chaire de Saint Pierre. Je sais que l’Eglise a été bâtie sur cette pierre. Quiconque mange l’Agneau hors de cette Maison est un profane ; tous ceux qui ne seront pas dans l’Arche de Noé au temps du déluge, périront dans les eaux.
Longtemps avant Saint Jérôme, Saint Irénée avait parlé dans le même sens ; (S. Iren. Lib. 3. cont. Her. et Epist., 57.) et Saint Cyprien traitant à son tour de l’Unité de l’Eglise s’exprime ainsi: (S. Cyp. Lib. De Unit. Eccl.) Le Seigneur dit à Pierre: (Matth., 16, 18.) « Moi, je dis à toi que tu es Pierre, et que sur cette pierre je bâtirai mon Eglise. » — Ainsi Il bâtit son Eglise sur un seul. Et si, après sa Résurrection, Il accorde un pouvoir égal à tous ses Apôtres ; s’Il leur dit: (Jean, 20, 21.) comme mon Père M’a envoyé, Je vous envoie ; recevez le Saint-Esprit ; cependant pour rendre l’unité plus frappante, il veut dans son Autorité souveraine, que cette unité, dés son origine, ne découle que d’un seul.
Optat de Milève dit à Parménion: (1, 2 ad Parm.) Vous ne pouvez vous excuser sous prétexte d’ignorance ; car vous savez que la chaire épiscopale de Rome a été donnée d’abord à Saint Pierre, qui l’a occupée comme Chef de tous les Apôtres. C’est dans cette chaire unique que l’unité devait être conservée par tous, de peur que chacun des Apôtres ne prétendit se rendre indépendant dans la sienne. Dés lors celui-là est nécessairement schismatique et prévaricateur, qui ose élever une autre chaire contre celle-ci qui est unique.
Puis c’est Saint Basile qui écrit: (Hom. 29.) Pierre a été placé pour être le fondement. Il avait dit à Jésus-Christ: vous êtes le Christ, Fils du Dieu Vivant: et à son tour il lui fut dit qu’il était Pierre, quoiqu’il ne fût pas pierre de la même manière que Jésus-Christ, qui est la figure immobile, mais seulement par la Volonté de Jésus-Christ. Dieu communique aux hommes ses propres dignités. Il est prêtre, et Il fait des prêtres, Il est pierre, et Il donne la qualité de pierre, rendant ainsi ses serviteurs participants de ce qui lui est propre.
Ecoutons enfin Saint Ambroise: Si quelqu’un objecte à l’Eglise qu’elle peut se contenter de Jésus-Christ pour Chef et pour Epoux unique, et qu’il ne lui en faut point d’autre, la réponse est facile. Jésus-Christ est pour nous non seule ment l’Auteur mais encore le vrai Ministre intérieur de chaque Sacrement. C’est vraiment Lui qui baptise et qui absout, et néanmoins, Il n’a pas laissé de choisir des hommes pour être les ministres extérieurs des Sacrements. Ainsi, tout en gouvernant Lui-même l’Eglise par l’influence secrète de son esprit, Il place aussi à sa tête un homme pour être son Vicaire et le dépositaire extérieur de sa Puissance. A une Eglise visible, il fallait un Chef visible. Voilà pourquoi notre Sauveur établit Saint Pierre Chef et Pasteur de tout le troupeau des Fidèles, lorsqu’Il lui confia la charge de paître ses brebis. toutefois Il le fit en termes si généraux et si étendus qu’il voulut que ce même pouvoir de régir toute l’Eglise passât à ses successeurs.
Au surplus c’est un seul et même esprit, écrit l’Apôtre aux Corinthiens, (I Cor., 12, 11, 12.) qui communique la grâce aux Fidèles, comme l’âme anime tous les membres d’un même corps. Travaillez, disait-il aux Ephésiens, en les exhortant à conserver l’unité, (Éph., 4, 3, 4.) travaillez avec soin à conserver l’unité de l’esprit dans le lien de la paix, vous ne faites qu’un corps et qu’un esprit. De même en effet que le corps humain se compose de plusieurs membres, et que tous ces membres sont animés par une seule âme qui communique aux différents organes leurs propriétés spéciales, aux yeux celle de voir, aux oreilles celle d’entendre, ainsi le Corps mystique de Jésus-Christ, qui est l’Eglise, est composé de tous les Fidèles.
Il n’y a également qu’une seule Espérance à laquelle nous sommes tous appelés comme l’atteste encore l’Apôtre au même endroit, (Éph., 4, 4.) puisque nous espérons tous la même chose, à savoir la Vie Eternelle et Bienheureuse. Il n’y a qu’une seule Foi que tous doivent garder et professer publiquement. (I Cor., 1, 10.) Qu’il n’y ait point de schismes parmi vous, dit Saint Paul. Il n’y a qu’un Baptême enfin (Éph., 4, 5.) qui est le sceau de la Foi chrétienne.
Le second caractère de l’Eglise, c’est la Sainteté. Vous êtes la race choisie, dit Saint Pierre, la nation Sainte. — Or, nous disons que l’Eglise est sainte :
1° Parce qu’est est vouée et consacrée à Dieu. C’est l’usage en effet d’attribuer cette qualité aux objets corporels ou matériels, par le fait qu’ils sont destinés et employés au culte de Dieu. Ainsi, par exemple, dans la Loi ancienne, les vases, les vêtements et les autels, aussi bien que les premiers-nés qui étaient consacrés au très-Haut. étaient appelés Saints.
Et il ne faut pas nous étonner que l’Eglise soit appelée sainte quoiqu’elle renferme beaucoup de pécheurs. Les Fidèles sont saints, parce qu’ils sont devenus le peuple de Dieu, et qu’ils sont consacrés à Jésus-Christ par la Foi, et par le Baptême qu’ils ont reçu ;ils sont saints, bien que trop souvent ils commettent des fautes et ne tiennent pas tout ce qu’ils ont promis. Ainsi ceux qui ont embrassé un art, continuent de porter le nom de leur profession, alors qu’ils n’en observent pas les règles. Voilà pourquoi Saint Paul donne aux Corinthiens le nom de sanctifiés et de saints, tout en trouvant au milieu d’eux des Chrétiens qu’il traitait de charnels, et à qui il adressait des reproches encore plus sévères. (I Cor., 1, 2 ; 5, 1.)
2° L’Eglise est sainte parce qu’elle est unie à un Chef saint dont elle est le Corps (Éph., 4, 15, 16.) ; à Notre-Seigneur Jésus Christ, Source de toute Sainteté, qui répand sur elle les dons du Saint-Esprit et les trésors de la Bonté divine. Aussi Saint Augustin, expliquant ces paroles du Prophète David : « Conservez mon âme, parce que je suis saint », dit-il admirablement: (in Psal. 85.) « Qu’il ne craigne pas, ce corps mystique de Jésus-Christ, qui ne fait vraiment qu’un seul homme, qu’il ne craigne plus d’élever la voix de toutes les parties de la terre, et de dire avec son Chef, et sous son Chef: je suis saint ; car il a reçu la grâce de la Sainteté, la grâce du Baptême et de la Résurrection des péchés. » Et un peu plus loin: « S’il est vrai que tous les Chrétiens et les Fidèles baptisés en Jésus-Christ aient revêtu Jésus Christ comme l’Apôtre l’assure dans ses paroles: Vous tous qui avez été baptisés en Jésus-Christ, vous avez revêtu Jésus-Christ (Gal., 3, 27.) ; s’il est vrai qu’ils soient devenus les membres de son Corps, et que cependant ils osent dire qu’ils ne sont pas saints, ils font injure au Chef dont les membres sont saints. » (Éph., 5, 26, 27, 20.)
3° enfin, l’Eglise est sainte parce qu’elle seule possède le culte du Sacrifice légitime et le salutaire usage des Sacrements, ces instruments efficaces de la Grâce divine par lesquels Dieu nous communique la Sainteté. En dehors d’elle, il est impossible d’être vraiment saint. II est donc de toute évidence que l’Eglise est sainte (Éph., 1, 1, 4.). Oui, et elle est sainte, précisément parce qu’elle est le Corps de Jésus Christ qui la sanctifie, et qui la purifie dans son Sang (Éph., 1, 7, 23.).
Le troisième caractère de l’Eglise, c’est qu’elle est catholique, c’est-à-dire Universelle. Et ce nom lui convient parfaitement, car, dit Saint Augustin, (S. Aug. Serm., 23.) par la lumière seule de la Foi, elle s’étend depuis l’orient jusqu’au couchant. Elle n’est point comme les Etats de la terre, ou les diverses hérésies, bornée aux frontières d’un royaume ou à une race d’hommes, Scythes ou barbares, libres ou esclaves, homme ou femme, (Gal., 3, 28.) elle renferme tout dans les entrailles de, sa charité. C’est pourquoi il est dit de notre Seigneur : (Ap., 5, 9, 10.) Vous nous avez rachetés et rendus à Dieu dans votre Sang, en nous tirant de toute tribu, de toute langue, de tout peuple, de toute nation, et vous avez fait de nous un Royaume à notre Dieu. C’est de l’Eglise que David disait: (Ps., 2, 8.) Demandez-moi, et je vous donnerai les nations pour héritage, et les limites de la terre pour bornes de votre empire. Et ailleurs: (Ps., 86, 4.) Je me souviendrai de Rahal et de Babylone qui me connaîtront, et une multitude de nations naîtront dans son sein.
D’ailleurs tous les Fidèles qui ont existé depuis Adam jusqu’aujourd’hui, tous ceux qui existeront tant que le monde sera monde, en professant la vraie Foi (Éph., 2, 10, 14, 17.) appartiennent à cette même Eglise établie sur les Apôtres et les Prophètes. Car tous ont été placés et fondés sur Jésus Christ, la Pierre angulaire, qui des deux peuples n’en a fait qu’un, et qui a annoncé la Paix à ceux qui étaient loin. — Une autre raison qui fait nommer l’Eglise Catholique, c’est que tous ceux qui désirent obtenir leur Salut éternel, doivent s’attacher à elle, et entrer dans son sein, comme autrefois il fallut entrer dans l’arche (Gn., 7, 7.), pour éviter de périr dans les eaux du déluge: C’est donc là une des marques les plus certaines pour distinguer la véritable Eglise de celles qui sont fausses.
Voici un dernier caractère propre à nous faire distinguer la véritable Eglise, elle vient des Apôtres, dépositaires du grand bienfait de la révélation. Sa doctrine n’est point une chose nouvelle, et qui commence, non, c’est la vérité transmise autrefois par les Apôtres, et répandue par eux dans tout l’univers. Il est donc évident pour tous que le langage impie des hérétiques d’aujourd’hui est absolument contraire à la Foi de la véritable Eglise, puisqu’il est si opposé à la doctrine prêchée par les Apôtres, et depuis eux jusqu’à nous. Voilà pourquoi les Pères du Concile de Nicée, pour faire comprendre à tous quelle était l’Eglise catholique, ajoutèrent au symbole, par une inspiration divine, le mot Apostolique. Et en effet, le Saint-Esprit qui gouverne l’Eglise, ne la gouverne que par des ministres apostoliques (c’est-à-dire par les successeurs légitimes des Apôtres). Cet esprit fut d’abord donné aux Apôtres, mais ensuite, grâce à l’infinie Bonté de Dieu, il demeura toujours dans l’Eglise (Saint Aug. cont. Cresc.). Et comme elle est la seule qui soit gouvernée par le Saint-Esprit, elle est aussi la seule qui soit infaillible dans la Foi et dans la règle des mœurs. Au contraire toutes les autres qui usurpent le nom d’Eglises sont sous la conduite de l’esprit du démon, et tombent nécessairement dans les plus funestes erreurs de doctrine et de morale.
Les figures de l’Ancien testament possèdent une vertu merveilleuse pour toucher le cœur des Fidèles, et pour leur remettre en mémoire les vérités les plus importantes. Aussi les Apôtres n’ont-ils pas manqué de s’en servir dans ce but. Voilà pourquoi à leur tour, les Pasteurs se garderont bien de négliger un moyen d’instruction si utile.
Or, parmi toutes ces figures, la plus expressive est l’Arche de Noé (Gn., 6, 14.). Construite par l’ordre formel de Dieu, elle était par là même une figure de l’Eglise. Sur ce point aucun doute n’est possible. Dieu a établi et fondé son Eglise dans des conditions telles que ceux qui y entreraient par le Baptême seraient préservés de la mort éternelle, tandis que ceux qui demeureraient hors de son sein périraient ensevelis sous leurs crimes ; tel fut le sort de ceux qui n’étaient point dans l’Arche.
Une autre figure encore, c’est cette grande cité de Jérusalem dont les saintes Ecritures emploient souvent le nom pour signifier la sainte Eglise. C’était dans ses murs seulement qu’il était permis d’offrir des sacrifices à Dieu. C’est également dans la Sainte Eglise de Dieu, et nulle part ailleurs, que se trouve le véritable culte, le véritable Sacrifice, le seul qui Lui soit agréable.
Enfin, les Pasteurs auront soin d’apprendre aux Fidèles pourquoi c’est un article de Foi de croire à l’Eglise. La raison et le sens sont bien suffisants pour s’assurer qu’il y a sur la terre une Eglise c’est-à-dire une société d’hommes dévoués et consacrés à Jésus-Christ. Pour en être convaincu, la Foi ne semble pas nécessaire. Les Juifs et les turcs eux-mêmes savent que l’Eglise existe. Mais pour les Mystères qu’elle renferme, — ceux dont nous venons de parler, et ceux dont nous parlerons dans le sacrement de l’Ordre — l’esprit a besoin d’être éclairé par la Foi pour les saisir et la raison seule ne saurait l’en convaincre. Ainsi cet article ne surpasse pas moins que les autres la portée naturelle et les forces de notre esprit. nous avons donc raison de dire que ce n’est point par l’intelligence, mais par les lumières de la Foi que nous connaissons l’origine, les dons et l’excellence de l’Eglise. C’est qu’en effet cette Eglise n’est pas l’œuvre de l’homme. C’est le Dieu immortel qui l’a fondée sur la pierre inébranlable. Le Prophète David nous le dit expressément: (Ps., 86, 5, 57.) Le très-Haut l’a établie Lui même. Aussi est-elle appelée l’héritage de Dieu (Ps., 2, 3, 58.) et le peuple de Dieu (Os., 2, 1, 59.). Son pouvoir ne lui vient pas non plus des hommes, mais de Dieu, et de même que la nature est incapable de lui donner ce pouvoir, de même aussi, c’est la Foi et non la nature qui nous fait admettre qu’elle a reçu les clefs du Royaume des cieux (Matth., 16, 19.), la puissance de re mettre les péchés (Jean, 20, 23.) d’excommunier les pécheurs (Matth., 18, 17.), de consacrer le vrai corps de Jésus-Christ (Hébr., 13, 19.), et enfin que les citoyens qui demeurent dans son sein, n’ont point ici-bas de demeure permanente, mais qu’ils cherchent la cité future où ils doivent habiter un jour (Hébr., 13, 14.).
Nous sommes donc rigoureusement tenus de croire que l’Eglise est Une, Sainte et Catholique.
Mais si, en croyant aux trois personnes de la Sainte Trinité, le Père, le Fils et le Saint-Esprit, nous mettons en elles notre Foi et notre confiance, ici au contraire, nous parlons autrement, et nous faisons profession de croire une Eglise Sainte, et non pas en une Eglise sainte. Et par cette manière différente de nous exprimer, nous conservons la distinction nécessaire entre le Créateur et les choses qu’il a créées, et nous attribuons à sa divine bonté tous les dons que l’Eglise possède.
Saint Jean l’Evangéliste, écrivant aux Fidèles sur les mystères de la Foi, leur donne la raison pour laquelle il les instruit de ces vérités ; (I Jean, 1, 3.) c’est afin, leur dit-il, que vous en triez en société avec nous, et que notre société soit avec le Père et avec Jésus-Christ son Fils. Or, cette société est la Communion des Saints, dont il est question dans cet article. Et plût à Dieu que les Pasteurs eussent le même cèle que Paul et les autres Apôtres, pour répandre cet enseignement ! Car ce n’est pas seulement une sorte de développe ment de l’article précédent, et une doctrine féconde par elle-même en fruits excellents, cet enseignement est aussi pour nous un guide et un maître dans l’usage que nous devons faire des vérités contenues dans le symbole. En effet, nous ne devons les étudier et les sonder, ces vérités, que pour nous rendre dignes d’être admis dans cette grande et heureuse Société des Saints, et pour y persévérer ensuite constamment, remerciant avec joie Dieu le Père, de nous avoir rendus dignes, par la lumière de la Foi, du sort et de l’héritage des Saints (Col., 1, 12.).
Il convient donc de bien montrer tout d’abord aux Fidèles que cette partie de l’article est un développement plus complet de ce que nous avons dit précédemment de la Sainte Eglise catholique. Comme cette Eglise est gouvernée par un seul et même esprit, tous les biens qu’elle a reçus deviennent nécessairement un fonds commun.
Le fruit de tous les Sacrements appartient à tous. Car les Sacrements, et surtout le Baptême qui est comme la porte par laquelle les hommes entrent dans l’Eglise, sont autant de liens sacrés qui les unissent tous et les attachent à Jésus-Christ.
Et ce qui prouve que la Communion des Saints n’est rien autre chose que la Communion des Sacrements, ce sont ces paroles des Pères du Concile de Nicée ajoutées au Symbole: Je confesse un seul Baptême (Saint J. Dam. De fid. orth. C, 12. 66.). Car tous les autres Sacrements, et l’Eucharistie en particulier, sont inséparables du Sacreraient de Baptême. Et même le nom de communion peut s’appliquer à chacun d’eux, car chacun d’eux nous unit à Dieu, et nous rend participants de la nature divine, par la grâce qu’il nous communique. Mais ce nom convient mieux à l’Eucharistie qu’à tout autre, parce que c’est elle principalement qui consomme cette communion.
Il est encore une autre espèce de communion à considérer dans l’Eglise. La Charité en est le principe. En effet, comme cette vertu ne cherche jamais ses intérêts propres (I Cor., 13, 5.), elle l’ait tourner au profit de tous les œuvres saintes et pieuses de chacun. Ainsi l’enseigne Saint Ambroise, en expliquant ces mots du Psalmiste: (Saint Amb. in Psal., 118. Serm., 3.) Je suis uni de cour à tous ceux qui vous craignent. « Comme un membre, dit-il, participe à tous les biens du corps, ainsi celui qui est uni à ceux qui craignent Dieu, participe à toutes les bonnes œuvres. » C’est pourquoi Notre-Seigneur Jésus-Christ, dans la Prière qu’Il nous a enseignée, nous ordonne de dire notre pain et non pas mon pain, et ainsi du reste, pour nous montrer que nous ne devons pas seulement penser à nous, mais encore au bien et au salut de tous les autres.
Pour marquer cette communauté de biens dans l’Eglise, nos Saints Livres emploient souvent la comparaison si juste des membres du corps humain. En effet, il y a plu sieurs membres dans le corps de l’homme (I Cor., 12, 14.), et néanmoins, ils ne font qu’un seul corps. Et ils remplissent tous, non la même fonction, mais la fonction particulière qui leur est propre. tous non plus n’ont pas la même dignité, et leurs fonctions ne sont ni également utiles, ni également honorables ; cependant aucun d’eux ne se propose son avantage et son utilité particulière, mais l’avantage et l’utilité du corps tout entier. D’autre part, ils sont si étroitement unis et si bien associés entre eux, que si l’un de ces membres éprouve une douleur quelconque, tous les autres l’éprouvent de même par affinité et par sympathie. Si au contraire il est heureux, tous les autres partagent son bonheur (Saint Aug. in Psal., 70. Serm., 2.). Or nous pouvons contempler ce spectacle dans l’Eglise. Elle renferme bien des membres différents et des nations diverses, des Juifs, des Gentils, des hommes libres et des esclaves, des riches et des pauvres. Mais dès qu’ils ont reçu le Baptême, ils ne font tous qu’un seul corps, dont Jésus-Christ est le Chef.
De plus, chacun dans l’Eglise a sa fonction déterminée (I Cor., 12, 28. Éph., 4, 11.). Les uns sont apôtres, les autres sont docteurs, mais tous sont établis pour l’avantage de la Société entière. Les uns ont la charge de commander et d’enseigner, les autres ont le devoir d’obéir et de se soumettre.
Cependant ces biens si précieux et si multiples, ces dons de la divine Largesse vont toujours à ceux qui vivent chrétiennement, gardent la Charité, pratiquent la Justice, et sont agréables à Dieu.
Quant aux membres morts, c’est-à-dire les malheureux esclaves du péché et privés de la grâce de Dieu, ils ne perdent pas, malgré tout, l’avantage de faire encore partie du corps de l’Eglise ; mais comme ils sont morts, ils ne reçoivent point les fruits spirituels qui appartiennent aux Chrétiens vraiment justes et pieux. néanmoins, par cela seul qu’ils sont toujours membres de l’Eglise, ils se trouvent aidés, pour recouvrer la Grâce qu’ils ont perdue et la Vie spirituelle, par ceux qui vivent de la vie de l’esprit ; et ils recueillent certains fruits de salut, dont demeurent privés ceux qui sont entièrement retranchés du sein de l’Eglise.
Les biens qui sont ainsi communs à tous, ne sont pas seulement les dons qui nous rendent justes et agréables à Dieu. Ce sont encore les grâces gratuites, comme la science, le don de prophétie, le don des langues et des miracles, et les autres dons de même nature. Ces privilèges qui sont accordés quelquefois même aux méchants, ne se donnent jamais pour un intérêt personnel, mais pour le bien et l’édification de toute l’Eglise. Ainsi le don des guérisons n’est point accordé pour l’avantage de celui qui en jouit, mais au profit des malades qu’il guérit. Enfin tout ce que le vrai Chrétien possède, il doit le regarder comme un bien qui lui est commun avec tous, et toujours il doit être prêt et empressé à venir au secours de l’indigence et de la misère du prochain. Car (II Jean, 3, 17.) si celui qui possède, voit son frère dans le besoin, sans le secourir, c’est une preuve manifeste qu’il n’a pas la Charité de Dieu en lui.
De là il est évident que ceux qui font partie de cette Communion jouissent déjà d’un bonheur appréciable, et peuvent répéter en toute vérité avec le Prophète David: (Ps., 83, 2.) Que vos tabernacles sont aimables, Seigneur, Dieu des vertus ! Mon âme soupire et tombe comme en défaillance en pensant à la Maison du Seigneur. Heureux, ô mon Dieu, ceux qui habitent dans votre Maison ! (Ps., 83, 5.)