(Hébreu : 68).
Le Psalmiste demande au Seigneur qu’il paraisse devant son peuple, et qu’il dissipe ses ennemis par sa présence.
Il décrit la pompe de sa marche et les merveilles qu’il opéra dans le désert.
Il excite tout le peuple à louer ce souverain Seigneur.
Ce psaume, comme en conviennent tous les commentateurs, est le plus difficile à entendre : de là le grand nombre des interprétations diverses.
Pour nous, il nous semble que c’est un cantique de triomphe, composé par David dans la cérémonie du transport de l’Arche Sainte de Cariathiarim à Jérusalem ou de la maison d’Obédédom dans le tabernacle dressé à Sion.
La plupart des Pères grecs et latins l’appliquent, dans le sens spirituel, à la venue, à la Résurrection, à l’Ascension de Jésus-Christ, à la prédication des Apôtres et à la conversion des Gentils ; saint Paul lui-même en a rapporté un passage à l’Ascension du Sauveur, comme on le verra dans les notes.
1 Psaume d'un cantique de David lui-même.Note Ps. 67,1 : Ce psaume, le plus difficile à comprendre de toute la collection, a été composé à l’occasion d’une guerre de David, peut-être la guerre contre les Syriens et les Ammonites, voir
2 Rois, chapitres 10 à 12 ;
1 Paralipomènes, chapitre 19 à 20, 3 ;
2 Rois, 8, 3-14 ;
1 Paralipomènes, 18, 3-13. Le verset 2 par lequel s’ouvre le psaume, est la reproduction des paroles de Moïse, voir
Nombres, 10, 35, et indique que l’arche avait été portée à l’armée, ce qui eut lieu dans la guerre contre les Syriens et les Ammonites, voir
2 Rois, 11, 11. David chante sa victoire. Le psaume se divise en deux parties et en neuf strophes. La 1re partie qui sert d’introduction, versets 2 à 19, est un tableau du passé ; la 2e, versets 20 à 36, chante le triomphe présent et remercie Dieu du succès qu’il a donné à son peuple.
2 Que Dieu se lève, et que ses ennemis soient dissipés; et que ceux qui le haïssent fuient devant sa face.Note Ps. 67,2 :
Que Dieu se lève. Comparer à
Nombres, 10, 35. ―
Et que ses ennemis ; c’est-à-dire les Philistins et les autres peuples ennemis du Dieu des Hébreux.
Note Ps. 67,2-4 : Quand Dieu, c’est-à-dire l’arche de Dieu, se lève, ses ennemis se dissipent comme la fumée, les méchants périssent.
3 Comme s'évanouit la fumée, qu'ils s'évanouissent : comme la cire fond à la face du feu, qu'ainsi périssent les pécheurs à la face de Dieu.4 Mais que les justes fassent des festins, et qu'ils exultent en la présence de Dieu ; et qu'ils se plaisent dans la joie.Note Ps. 67,4 : Mais que les justes, etc. Comparer à 1 Paralipomènes, chapitres 15 et 16.
5 Chantez Dieu, dites un psaume à la gloire de son nom : faites un chemin à celui qui monte sur le couchant : le Seigneur est son nom. Exultez en sa présence : les pécheurs, seront troublés devant sa face,Note Ps. 67,5 : Faites un chemin. C’est une apostrophe aux habitants des lieux où devait passer l’Arche sainte. ― Sur le couchant ; c’est-à-dire sur le mont de Sion vers le couchant.
Note Ps. 67,5-7 : Chantez en l’honneur de Dieu, préparez-lui le chemin quand il passe (dans son arche), dans son lieu saint, car il est le père de l’orphelin et le défenseur de la veuve, le libérateur du captif ; il laisse seulement les rebelles dans le tombeau ou dans le désert aride, comme porte l’hébreu.
Note Ps. 67,5 : Ceux qui sont d’un même esprit (unius moris) ; le peuple israélite. ― Qui fait sortir, etc. ; qui a délivré nos pères de l’esclavage de l’Egypte par sa force toute-puissante. ― Ceux qui l’irritent, etc. On explique, dans le sens spirituel, cette fin du verset, des Gentils que Jésus-Christ a délivrés de la mort du péché et du tombeau de l’ignorance où ils étaient ensevelis, quoiqu’ils l’offensassent continuellement.
6 Lui. le père des orphelins, et le juge des veuves. Dieu est dans son lieu saint;7 Dieu qui fait habiter dans sa maison ceux qui sont d'un même esprit : Qui fait sortir par sa puissance ceux qui sont dans les liens, et pareillement ceux qui l'irritent, qui habitent dans des sépulcres.
8 Ô Dieu, lorsque vous sortiez en présence de votre peuple, lorsque vous passiez dans le désert,Note Ps. 67,8 : Le Psalmiste commence à décrire les merveilles que le Seigneur opéra dans le désert après la sortie d’Egypte. Débora dans son cantique (voir
Juges, 5, 4-5) et
Habacuc dans sa prophétie (3, vv. 6, 10) font une description semblable de la pompe du Seigneur marchant dans le désert et descendant à Sinaï.
Note Ps. 67,8-11 : Les versets 6 et 7 rappellent l’Exode et ce que Dieu a fait pour son peuple dans le désert ; les versets 8 à 11 continuent à parler des merveilles de cette époque ; ils rappellent la promulgation de la loi sur le Sinaï et l’occupation de la Terre Promise. ― Vos animaux désignent Israël considéré comme un troupeau dont Dieu est le pasteur.
9 La terre fut ébranlée ; car les cieux se fondirent en eaux à la face du Dieu du Sinaï, à la face du Dieu d'Israël.10 Vous réserverez, ô Dieu, une pluie volontaire pour votre héritage; il a été affaibli, mais vous, vous l'avez fortifié.Note Ps. 67,10 : Une pluie volontaire ; une pluie de faveur. Cette pluie est, selon les uns, une pluie réelle, qui rafraîchit les hébreux dans l’accablement et la lassitude où ils étaient réduits, et, selon les autres, la manne dont ils furent nourris dans le désert. Les Pères expliquent cette pluie, dans le sens spirituel, de la doctrine évangélique, et dans le sens littéral de la manne.
11 Vos animaux y habiteront; vous avez, ô Dieu, préparé par un effet de votre douceur une nourriture au pauvre.
12 Le Seigneur donnera la parole à ceux qui annonceront la bonne nouvelle, avec une grande force.Note Ps. 67,12 :
Le Seigneur donnera, etc. Comparer à
Matthieu, 10, 19-20 ;
Luc, 21, 15. ―
Avec une grande force ; littéralement
vertu (virtute). Le terme hébreu traduit dans la Vulgate par
virtus, signifiant
armée, multitude, bien des interprètes traduisent cette fin de verset :
En grand nombre. Comparer au verset suivant.
Note Ps. 67,12-15 : Le texte original peut se traduire ainsi :
Adonaï (le Seigneur) donne le signal ;
Les messagères de la victoire sont une armée nombreuse.
Les rois des armées s’enfuient, s’enfuient,
Et la maîtresse de la maison ramasse le butin.
Puis, quand vous vous reposez [en paix] au milieu des abreuvoirs,
[Vous êtes comme] les ailes de la colombe aux reflets d’argent,
Au plumage étincelant d’or. Quand le Tout-Puissant dissipe les rois,
La neige blanchit le Selmon. Le sens des quatre premiers vers est suffisamment clair ; celui des cinq derniers paraît d’une obscurité impénétrable. La strophe entière peint la conquête de la Terre Promise. Dieu donne le signal du combat et la victoire est gagnée ; de nombreuses jeunes filles chantent le triomphe, voir
Exode, 15, 20 ;
Juges, 11, 34. Les rois qui s’enfuient sont les ennemis du peuple de Dieu vaincus ; leurs dépouilles sont rapportées à la maison et données aux femmes, voir
Juges, 5, 30. Alors les Israélites peuvent vivre en paix au milieu de leurs troupeaux ; ils sont enrichis et parés des riches bijoux conquis ; les ennemis s’enfuient du côté de Selmon et le font briller comme s’il était couvert de neige.
13 Le roi des armées sera soumis au bien-aimé, au bien-aimé; et ce sera à la beauté de la maison de partager les dépouilles.Note Ps. 67,13 :
Le roi des armées ; le roi le plus puissants des rois nos ennemis ; littéralement
des vertus (virtutum). Voir
Psaumes, 23, 10. ―
Au bien-aimé, au bien-aimé ; cette répétition donne une nouvelle force à l’expression, qui représente déjà par elle-même un superlatif. Cette expression peut s’appliquer au peuple d’Israël, qui assujettit les rois puissant du pays de Chanaan, mais elle convient bien mieux à Jésus-Christ, le bien-aimé du Père, l’objet de toutes ses complaisances (voir
Matthieu, 3, 17). ―
La beauté de la maison ; c’est-à-dire la femme, qui, selon la coutume de l’Orient, demeure presque toujours renfermée dans sa maison. ―
De partager les dépouilles. Le Psalmiste fait allusion à Débora et à Jahel, femme d’Haber le Cinéen (voir
Juges, chapitre 4 ; 5, 19-20). C’était, en effet, l’ancien usage de la guerre de partager les dépouilles des vaincus.
14 Si vous dormez au milieu de vos héritages, vous serez comme des ailes argentées d'une colombe dont les extrémités du dos ont une pâleur d'or.Note Ps. 67,14 : Dans son Comment. Littéral sur ce verset, D. Calmet dit : « Les interprètes se tourmentent inutilement ici, pour donner un sens distinct à ce texte, qui est d’une obscurité presque impénétrable. » Cependant le savant auteur essaie de donner une explication tout en avouant qu’il ne sera « peut-être pas plus heureux qu’ils ne l’ont été. » Quant à nous, nous chercherons simplement à éclaircir par quelques mots notre traduction, reproduction littérale de la Vulgate et des Septante. Voici donc comment nous entendons ce verset : Quand, dans la terre promise, vous posséderez les lots ou héritages qui vous seront échus par le sort, vous deviendrez riches et opulents, vous brillerez par l’argent et l’or comme les colombes dont le plumage reflète l’argent et l’or.
15 Tandis que le roi du ciel disperse des rois sur elle, ils deviendront blancs par la neige qui est sur Selmon.Note Ps. 67,15 : Sur elle (super eam) ; sur la terre exprimée au verset 9, ou mieux, peut-être, sur l’héritage, (hæreditas) du verset 10, lequel est féminin en latin. ― Ils deviendront blancs par la neige abondante du mont Selmon, sous laquelle ils seront ensevelis ; selon d’autres : Les lieux deviendront blancs comme la neige, par les ossements des cadavres qui les couvriront. C’est ainsi qu’on lit dans Virgile (Enéid., V, 865) : Des rochers blancs d’ossements ; et (XII, 36) : Les champs sont blancs par les ossements ; et dans Ovide (Fast., l. I) : La terre est blanche d’ossements humains. La première interprétation nous semble plus simple et plus naturelle.
16 La montagne de Dieu est une montagne grasse : Montagne fertile, montagne grasse.Note Ps. 67,16 : Fertile ; littéralement coagulée, caillée (coagulatus).
Note Ps. 67,16-19 : Traduction du texte original :
Montagnes de Dieu, montagnes de Basan !
Montagnes aux cimes élevées, montagnes de Basan !
Pourquoi êtes-vous jalouses, hautes cimes,
De la montagne que Dieu a choisie pour y habiter ?
Jéhovah y habitera à jamais.
Le char de Dieu, des milliers,
Une multitude innombrable,
Dieu lui-même, le Sinaï [viennent] dans ce sanctuaire.
Tu montes sur le sommet [de Sion], tu amènes tes prisonniers,
Tu reçois les présents des hommes, des ennemis eux-mêmes.
Et tu y demeures, Jéhovah, Dieu !
Cette strophe nous représente Dieu choisissant le mont Sion pour sa demeure. David met en présence les hautes montagnes de Basan (la Vulgate a pris ce nom pour un substantif commun et le traduit par gras), et les collines de Jérusalem. C’est-à-dire le mont Sion. Par une figure hardie, il suppose les montagnes de Basan jalouses de Sion. Dieu descend sur ce dernier, avec son innombrable cour, et là il reçoit l’hommage de tous.
17 Pourquoi regardez-vous avec envie des montagnes fertiles? La montagne sur laquelle il a plu à Dieu d'habiter; car le Seigneur y habitera jusqu'à la fin.18 Le char de Dieu est entouré de plus de dix mille ; ce sont des milliers de saints qui se livrent à la joie ; le Seigneur est au milieu d'eux, à Sinaï dans son sanctuaire.Note Ps. 67,18 : A Sinaï ; c’est-à-dire comme autrefois sur le mont Sinaï.
19 Vous êtes monté en haut, vous avez pris une captivité : vous avez reçu des dons parmi les hommes; Car vous avez pris ceux qui ne croyaient pas que le Seigneur Dieu habitât au milieu de son peuple.Note Ps. 67,19 :
Vous êtes, etc.
Monter, s’élever en haut, se dit souvent en parlant de Dieu, lorsqu’il fait éclater sa gloire, qu’il s’élève en quelque sorte au-dessus de la terre, pour manifester sa puissance et sa majesté. Voir
Psaumes, 46, 6 ;
56, vv. 6, 12 ;
107, 6 ;
112, 4. ―
Vous avez pris, assujetti, emmené ;
une captivité ; un grand nombre de captifs. ―
Ceux qui ne croyaient pas ; est régi par le verbe
vous avez pris, qui précède. Saint Paul, dans
Ephésiens, 4, 8, applique ce verset à l’Ascension de Jésus-Christ.
20 Béni soit le Seigneur un jour, chaque jour : il nous fera un chemin prospère, le Dieu de nos victoires.Note Ps. 67,20 :
Victoires ; littéralement
saluts, délivrances. Voir, sur ce mot,
Psaumes, 43, 5.
Note Ps. 67,20-36 : IIe partie : Tableau du présent : Après avoir rappelé tout ce que Dieu a fait pour son peuple et pour Jérusalem où il vient demeurer, David loue le Seigneur de la victoire qu’il vient de lui faire remporter.
Note Ps. 67,20-24 : Tableau de la victoire. Une partie de la guerre avait eu pour théâtre le pays de Basan.
21 Notre Dieu est le Dieu qui sauve; et au Seigneur, au Seigneur appartient de retirer de la mort.22 Mais Dieu brisera les têtes de ses ennemis; le sommet chevelu de ceux qui marchent dans leurs péchés.23 Le Seigneur a dit : De Bazan je les amènerai, je les amènerai dans le profond de la mer;24 En sorte que ton pied soit teint dans du sang, que la langue de tes chiens le soit du sang de tes ennemis.
25 Ils ont vu vos marches, ô Dieu, les marches de mon Dieu, de mon roi qui est dans le sanctuaire.Note Ps. 67,25-28 : Tableau du triomphe au retour de l’armée victorieuse.
26 Des princes joints à des joueurs de psaltérion ont précédé, au milieu de jeunes filles battant du tambour.27 Dans des assemblées bénissez Dieu, le Seigneur, vous sortis des sources d'Israël.28 Là était le jeune Benjamin, dans l'extase de son esprit. Les princes de Juda, leurs chefs; les princes de Zabulon, les princes de Nephthali.Note Ps. 67,28 : Dans l’extase de son esprit, dans la surprise, dans l’abattement. Le sens de l’hébreu est : Benjamin, le jeune ou le petit, domine, est à la tête de ses frères, parce que c’est de cette tribu qu’est sorti Saül, le premier roi. Puis viennent les princes de Juda, etc.
29 Commandez, ô Dieu, à votre puissance; affermissez, ô Dieu, ce que vous avez opéré parmi nous.Note Ps. 67,29-31 : Prière pour que Dieu continue à protéger Jérusalem.
30 Du milieu de votre temple qui est dans Jérusalem, des rois vous offriront des présents.31 Réprimez les bêtes du roseau, assemblée de taureaux au milieu des vaches des peuples, afin de chasser ceux qui ont été éprouvés par l'argent. Dissipez des nations qui veulent les guerres.Note Ps. 67,31 : Les bêtes du roseau ; c’est-à-dire les bêtes sauvages. ― Assemblée de taureaux (congregatio taurorum). Il faudrait régulièrement l’accusatif (congregationem) ; mais, comme nous l’avons déjà fait observer au milieu des Observations préliminaires, 1°, la Vulgate met ces cas l’un pour l’autre, sans égard pour la concordance latine. Cette même anomalie se trouve dans la version grecque. ― Au milieu, etc. ; c’est-à-dire des troupeaux de vaches. ― Ces divers animaux désignent les ennemis d’Israël : les Philistins, les Chananéens, les Egyptiens. ― Qui ont été éprouvés par l’argent ; c’est-à-dire comme l’argent ; ce qui s’applique aux Israélites. ― Les bêtes du roseau symbolisent l’Egypte où les roseaux abondent.
32 Des ambassadeurs viendront d'Egypte; l'Ethiopie tendra la première ses mains vers Dieu.Note Ps. 67,32-36 : Invitation à tous les peuples de la terre à louer le vrai Dieu.
33 Royaumes de la terre, chantez Dieu; jouez du psaltérion en l'honneur de Dieu,34 Qui est monté sur le ciel du ciel, vers l'Orient. Voici qu'il donnera à sa voix une voix de puissance :Note Ps. 67,34 : Le ciel du ciel ; hébraïsme, pour tous les cieux. ― Vers l’orient. Jésus-Christ s’éleva au ciel de la montagne des Oliviers, qui est à l’orient de Jérusalem. ― Une voix de puissance ; hébraïsme, pour une voix très puissante.
35 Donnez gloire à Dieu, au sujet d'Israël; sa magnificence et sa puissance éclatent dans les nues.Note Ps. 67,35 : Au sujet d’Israël ; pour les prodiges qu’il a opérés en faveur d’Israël.
36 Dieu est admirable dans ses saints, le Dieu d'Israël lui-même donnera puissance et force à son peuple : béni soit Dieu.Note Ps. 67,36 : Dans ses saints. Le texte original doit se traduire : dans ses sanctuaires, dans les lieux sanctifiés par le séjour et la présence de l’arche, le Sinaï, Silo, le mont Sion.