La Genèse - Introduction
La Genèse se divise en dix sections d’inégale longueur et d’inégale importance, mais très caractérisées. Elles sont précédées du récit de la création, qui sert d’introduction et de préface à tout le Pentateuque et à toute la Bible.
Création du monde, du chapitre 1 au chapitre 2, verset 3.
1° Histoire des origines du monde et de l’humanité, du chapitre 2, verset 4 au chapitre 4, verset 26.
2° Histoire de la descendance d’Adam, du chapitre 5 au chapitre 6, verset 8.
3° Histoire de Noé, du chapitre 6, verset 9 au chapitre 9, verset 29.
4° Histoire des enfants de Noé, du chapitre 10 au chapitre 11, verset 9.
5° Histoire de Sem, chapitre 11, versets 10 à 26.
6° Histoire de Tharé et d’Abraham, du chapitre 11, verset 27 au chapitre 25, verset 11.
7° Histoire d’Ismaël, chapitre 25, versets 12 à 18.
8° Histoire d’Isaac, du chapitre 25, verset 19 au chapitre 35.
9° Histoire d’Esaü, chapitre 36.
10° Histoire de Jacob, du chapitre 37 au chapitre 50.
Ainsi au commencement de la section 10e , nous lisons : « Voici les générations de Jacob : Joseph avait dix-sept ans, etc. » Le mot générations signifie ici purement et simplement histoire, puisque ces générations ont été déjà énumérées, voir chapitre 30 ; tous les fils de Jacob sont nés pendant la vie d’Isaac et pour ce motif leur naissance a été racontée dans l’histoire d’Isaac et n’est pas répétée ici. De même, chapitre 2, verset 4 et suivants : « Voici les générations du ciel et de la terre, » signifie simplement : « Voici l’histoire de la création, etc. »
Cette division est très clairement indiquée dans la Genèse même. Chacune des dix sections commence par ces mots : Voici les générations. C’est pour ainsi dire le titre qui annonce aux lecteurs une nouvelle partie du livre. Moïse emploie le mot de générations de la même manière que nous emploierions le mot d’histoire, parce que les généalogies forment le cadre de son histoire et que les générations des patriarches sont en même temps l’histoire des patriarches et de leur famille. La Genèse est comme un vaste tableau généalogique auquel est joint le récit des événements. C’est là ce qui constitue l’unité de la Genèse et en explique le tissu et la composition.
L’auteur suit une marche uniforme et traite son sujet, dans chacune de ses dix sections, de la même manière. Quand une généalogie se subdivise en plusieurs rameaux, les rameaux secondaires, dont les chefs ont été nommés dans le récit des événements, obtiennent toujours une mention. Ces rameaux sont invariablement énumérés dans l’ordre inverse de leur importance et avant la branche principale. Les branches secondaires sont ainsi éliminées et ne reparaissent plus, si ce n’est accidentellement. Le nombre d’années qu’a vécu chacun des patriarches de la ligne directe est constamment donné ; ce nombre n’est point indiqué pour les lignes latérales, Ismaël excepté. L’auteur se contente de relever en passant quelques particularités de leur histoire. Il pousse généralement l’énumération des descendants assez loin.
Chaque section commence d’ordinaire par une répétition ou récapitulation. Ainsi nous lisons, à Genèse, chapitre 25, versets 19 et 20 : « Voici les générations d’Isaac, fils d’Abraham. Abraham engendra Isaac. Celui-ci, à l’âge de quarante ans, épousa Rébecca, fille de Bathuel, le Syrien de Mésopotamie, sœur de Laban. » Tous ces événements avaient été déjà racontés plus haut en détail, chapitres 21 et 24. Ce résumé n’est pas conforme à nos habitudes et à nos procédés littéraires, mais il n’en est pas moins très caractéristique, il sert tout à la fois de transition et d’avertissement, pour indiquer le passage d’un sujet à un autre et le commencement d’une nouvelle section.
Voici quel est le contenu des dix sections.
Après le préambule de la création des six jours, l’auteur raconte :
1° La génération du ciel et de la terre, du chapitre 2, verset 4 au chapitre 4, verset 26, c’est-à-dire l’histoire primordiale de tous les êtres terrestres et de l’homme lui-même, le commencement de l’histoire du monde, le paradis terrestre, la chute d’Adam et sa descendance dans la ligne de Caïn, jusqu’à la septième génération.
2° Le livre des générations d’Adam, du chapitre 5 au chapitre 6, verset 8, nous fait connaître la descendance d’Adam dans la ligne bénie de Seth et comprend dix générations jusqu’à Noé, c’est-à-dire l’histoire antédiluvienne des enfants de Dieu.
3° Les générations de Noé, du chapitre 6, verset 9 au chapitre 9, verset 29, forment une section à part, à cause de l’importance de ce patriarche qui est comme le second père de l’humanité et au nom duquel se rattache l’histoire du déluge.
4° Les générations des enfants de Noé, du chapitre 10 au chapitre 11, verset 9, tiges de tous les peuples de la terre, méritent une division particulière, qui est la célèbre Table ethnographique de la Genèse, laquelle est comme le point de départ et le principe de toutes les histoires particulières.
5° A partir de là, la Bible cesse d’être l’histoire générale de l’humanité pour devenir d’abord l’histoire de la famille de Sem, puis, en se restreignant de plus en plus, de la famille d’Abraham, et enfin seulement de l’unique famille de Jacob. La 5e section, chapitre 11, versets 10 à 26, énumère brièvement les générations de Sem, en s’attachant exclusivement à la ligne principale, les autres lignes accessoires ayant été mentionnées dans la section précédente. L’objet de cette partie, qui, pour les premières générations, n’est qu’une répétition, est de nous montrer que l’histoire se circonscrit et abandonne toutes les lignes généalogiques collatérales. La famille de Sem se perpétue jusqu’au jour où sa mission divine va être manifestée.
6° Les générations de Tharé, du chapitre 11, verset 27 au chapitre 25, verset 11, commencement à nous faire entrer dans le vif de l’histoire du peuple de Dieu, tout en donnant lieu à de nouvelles éliminations, celle des frères d’Abraham et de leur postérité, dont la vie nous est cependant racontée autant qu’il est nécessaire pour comprendre la suite des événements postérieurs ; mais la plus large place est donnée, comme il convient, à Abraham. Cette période est une période de pérégrinations dont l’objectif bien déterminé est le pays de Chanaan où se rend le patriarche.
7° Les générations d’Ismaël, chapitre 25, versets 12 à 18, sont données brièvement avant celle d’Isaac, selon la règle constante de l’auteur de la Genèse, qui, comme nous l’avons mentionné plus haut, énumère toujours la postérité des personnages dont elle a parlé, mais en faisant précéder par la généalogie des branches secondaires la généalogie de la branche principale.
8° Les générations d’Isaac, l’héritier des promesses divines faites à Abraham, commencent aussitôt que Moïse en a fini avec Ismaël, le rejeton secondaire, du chapitre 25, verset 19 au chapitre 35. Elles contiennent en même temps l’histoire de ses deux enfants, Jacob et Esaü, jusqu’au moment où Isaac meurt et où Jacob devient ainsi le chef de la famille. Cette section est l’histoire d’un premier séjour en Palestine.
9° Avant de passer à l’histoire de Jacob, le personnage principal, Moïse, conformément à la règle qu’il suit sans exception, nous fait connaître les générations d’Esaü, chapitre 36. Il les poursuit assez loin et probablement jusqu’à son époque, voir Nombres, chapitre 20, verset 14 et suivants, ce qui nous prouve que l’intention de Moïse, en nous fournissant tous les détails, était de planter en quelque sorte des jalons et d’éclairer à l’avance la suite du récit du Pentateuque.
10° Les générations de Jacob, du chapitre 37 au chapitre 50, terminent le livre de la Genèse. Moïse raconte dans cette dernière section l’établissement des Israélites en Egypte. Elle s’ouvre par le récit de l’événement dont se servit la Providence pour amener en Egypte Joseph, qui devait y attirer plus tard son père et ses frères, et elle se termine par la mort de Jacob et de Joseph, qui y laissent leur postérité.
« La Genèse [a donc] été rédigée sur un plan d’une entière régularité ; elle est en réalité un grand tableau généalogique accompagné d’un texte explicatif, un tableau généalogique où les événements de l’histoire primitive et de l’histoire patriarcale viennent s’intercaler dans les intervalles de la ligne principale ou des lignes secondaires, selon les personnages qui y jouent un rôle prépondérant, et dans lequel les faits ainsi distribués reçoivent un développement proportionné à leur importance dans l’ensemble. En un mot, dans le premier livre de Moïse, la généalogie est le cadre de l’histoire. » (EMM. COSQUIN.)