Introduction
Ezéchiel (Dieu rend fort) était fils de Buzi, et de race sacerdotale. Onze ans avant la ruine de Jérusalem, en 598 avant Jésus-Christ, il fut transporté par Nabuchodonosor à Babylone avec le roi Jéchonias, les grands du royaume et un certain nombre de prêtres. Il se fixa à Tell-Abib, sur les bords du fleuve Chobar, au milieu d’une colonie de Juifs, déportés comme lui ; là il se maria et eut une maison à lui. La cinquième année de sa captivité, en 593 avant Jésus-Christ, il fut appelé de Dieu au ministère prophétique, et il l’exerça au moins vingt-deux ans, puisque la prophétie du chapitre 29, verset 17, est datée de la vingt-septième année de sa captivité, en 571 avant Jésus-Christ. Une antique tradition rapporte qu’il fut mis à mort par un prince de son peuple à qui il reprochait son idolâtrie, et qu’il fut enseveli dans le tombeau de Sem et d’Arphaxad. Il mourut sur la terre étrangère, avant la conquête de Babylone par Cyrus. Ce prophète vécut ainsi pendant les plus mauvais jours de l’histoire de Juda ; déporté, il apprit en exil les détails lamentables de la ruine de Jérusalem et du temple, et il ne vit pas briller la délivrance, plus malheureux que Jérémie, laissé par les Chaldéens dans sa patrie pour en pleurer les désastres, et que Daniel, qui contribua auprès du vainqueur de Babylone à mettre un terme à la captivité.
Mais l’énergie et la forte trempe de son caractère, qui avaient leur racine dans sa foi, lui firent supporter avec patience et courage les épreuves de la captivité. Profondément attaché à la religion de ses pères, rempli des sentiments du plus ardent patriotisme, c’était bien le prophète qu’il fallait pour soutenir ses frères emmenés avec lui en captivité ; aussi allaient-ils chercher auprès de lui et dans sa maison les consolations dont ils avaient besoin. Jamais il ne se conduit comme un homme ordinaire ; il se comporte toujours, il pense, il sent, il agit, comme un prophète soutenu par le bras de Dieu et plein d’une force surnaturelle.
Le style d’Ezéchiel se distingue dans l’original par un grand nombre de mots et de formes qui lui sont propres. Il s’efforce d’imiter le langage du Pentateuque ; mais vivant au milieu d’un peuple étranger qui parle l’araméen, il emprunte beaucoup à cette langue. Le trait le plus caractéristique du genre du prophète, c’est sa prédilection pour les symboles. Non seulement ils sont très nombreux dans ses écrits, mais il les expose et les développe plus longuement et avec plus de détails qu’aucun autre écrivain inspiré. De plus, un grand nombre de ses images sont nouvelles et empruntées au milieu dans lequel il vivait, ainsi que nous le verrons plus loin. C’est principalement de là que provient l’obscurité de son langage. Mais si son langage est peu clair, la faute en est beaucoup plus à notre ignorance qu’à sa manière de parler ; les images qui lui étaient familières, ainsi qu’à ceux qui vivaient avec lui en captivité, nous sont inconnues, et par suite fort peu intelligibles. Il n’a pas, du reste, l’éclat d’Isaïe, mais il surpasse en élégance Jérémie.
L’authenticité des prophéties d’Ezéchiel n’a jamais été sérieusement contestée.
Ces prophéties forment un tout bien ordonné. Elles se partagent en deux parties très distinctes : la première, du chapitre 1 au chapitre 32, antérieure à la prise de Jérusalem, a pour objet les jugements de Dieu contre son peuple et les peuples étrangers ; et la seconde, du chapitre 33 au chapitre 48, postérieure à la ruine de Jérusalem et du temple, l’accomplissement des promesses messianiques faites à Israël.
La destruction de la capitale de la Judée est donc le point central de tout le livre. Avant la catastrophe, le but d’Ezéchiel est d’exciter au repentir de leurs fautes ceux qui vivent dans une fausse sécurité, de les prémunir contre la confiance aveugle qu’ils mettent dans le secours de l’Egypte, car elle ne pourra les sauver des mains des Babyloniens, et de les assurer que le siège de la cité sainte est proche et leur malheur inévitable. Après ce terrible événement, il s’occupe surtout de consoler les captifs par la promesse de la délivrance future et du retour dans la patrie ; il les encourage en même temps par l’assurance des bénédictions messianiques.
Tous les oracles d’Ezéchiel sont disposés par ordre chronologique, excepté ceux qui concernent les nations étrangères, du chapitre 25 au chapitre 32. Ces derniers sont rangés d’après la nature des sujets ; ils portent leur date, et elle montre qu’ils appartiennent à la première partie du livre, non à la seconde. Ils ont été la plupart composés dans l’intervalle qui sépare l’annonce du siège de Jérusalem et l’arrivée de la nouvelle de la prise de cette ville. — On admet généralement que les prophéties d’Ezéchiel ont été rangées dans leur ordre actuel par leur auteur lui-même.